Yacht Class n°25 (juin-juillet-août 2021)

José Sotto Mayor Matoso est un nom majeur dans l’histoire du Club Naval de Cascais (CNC). Dragoniste émérite, il a été présent à tous les moments décisifs pour le club ces dernières années, en tant que vice-président et président. Et il continuera à l’être, maintenant en tant que Commodore, un rôle qu’il abordera sous l’angle des perspectives d’avenir du club.José Sotto Mayor Matoso est né à Lisbonne, marié, père de trois enfants et a eu une longue et fructueuse carrière professionnelle dans l’administration des affaires, tant au Portugal qu’à l’étranger. Il en va de même pour son lien avec le Club Naval de Cascais, dont il est membre depuis 1972. Navigateur depuis son plus jeune âge, et avec un palmarès enviable dans ce sport, il a été l’une des figures les plus influentes et les plus en vue du CNC. C’est pourquoi, à l’unanimité, l’équipe exécutive actuelle a considéré que José Sotto Mayor Matoso était l’élément idéal pour succéder à Miguel Horta e Costa, afin d’assumer les fonctions de Commodore du CNC, poste auquel il a été nommé en juin dernier. Mais laissons-lui la parole…

De Lisbonne à Cascais

Membre du Clube Naval de Cascais depuis 1972, José Sotto Mayor Matoso n’a aucun lien ancestral ni avec le club ni avec Cascais : « Je me suis installé définitivement à Cascais en 1963, quand j’avais dix ans, et avant cela je naviguais avec mon père, qui avait un bateau de 33 pieds. Je me souviens que ma première expédition nautique a été d’aller avec lui du quai de Belém à Praia da Rocha, j’avais environ sept ans, et c’est quelque chose que je n’oublierai jamais. Puis vint la passion de la voile : j’ai commencé à l’âge de 12 ans. Toujours à Belém, car à Cascais l’activité nautique se déroulait essentiellement pendant les mois d’été. J’ai donc commencé à pratiquer à Lisbonne. Celle qui m’a appris à naviguer était une monitrice, et à cette époque, les femmes qui naviguaient se comptaient sur les doigts d’une main… J’ai réussi à obtenir de la Brigade navale, un Snipe. C’était la section nautique de la Légion portugaise. Puis, j’ai débuté en Finn, mais j’avais déjà environ 17 ans. C’est un bateau auquel je me suis beaucoup intéressé car, en 1971, la Gold Cup était organisée à Cascais, et c’était la classe la plus disputée de toutes. Nous avions 160 ou 170 bateaux ! Cela m’excitait, car tous les champions étaient là, et j’ai commencé à prendre les choses au sérieux.

Cascais comme point de référence

A cette époque, et aussi à travers la Finn Gold Cup, Cascais commençait à devenir un lieu d’excellence pour la voile, même à l’international. La classe Finn était très enracinée parmi nous, aussi parce que le président de la classe était Patrick Monteiro de Barros, Commodore honoraire du CNC. Une personne extrêmement organisée, qui a fait bouger les choses, j’étais même son secrétaire à l’époque, et il y avait beaucoup d’activité pendant l’hiver à Lisbonne, et l’été à Cascais. Puis je suis allé en France acheter ce qui était une des Rolls Royce de l’époque : un Finn Lanaverre ! Pendant cette période, j’ai pris la voile vraiment au sérieux, devenant Champion National Junior. Le point culminant de cette phase furent les Jeux Olympiques de Munich, où Kiel accueillait la compétition de voile. J’étais deuxième des qualifications, mais remplaçant. Je n’ai pas participé aux cérémonies officielles, mais j’étais à Kiel tout le temps, et l’ambiance olympique y était fantastique, même si les attentats de Munich m’ont beaucoup marqué.

Aventure américaine… et plus !

Bien que j’aie continué à naviguer à Cascais, toujours en Finn, suite à la révolution de 1974, je suis parti aux USA pour terminer mon cursus de génie mécanique, puis j’ai intégré une école de commerce, à l’Université de Columbia. Je suis resté aux États-Unis car engagé par J.P. Morgan, et je ne suis reparti que onze ans plus tard. Je suis allé à Madrid pendant quatre ans, puis en Italie, également au service de la banque. En 1977, mon père a décidé d’acheter avec moi, l’Alvorada, un Swan 47. A cette époque, il était encore possible de courir avec un bateau standard, et, avec quelques amis de la voile, nous avons remporté pratiquement toutes les courses qu’il y avait à gagner au Portugal. Comme le bateau était compétitif, nous sommes allés faire des courses en Méditerranée. Nous avons fait troisièmes de notre classe. L’année suivante, nous sommes allés au championnat en Sardaigne, au Yacht Club Costa Smeralda, alors dans sa troisième année d’existence, et avons organisé des compétitions pour promouvoir à la fois la région et le club. Suite à mon mariage, je ne suis rentré au Portugal que fin 1986.

L’âge d’or du Dragon

À un certain moment, la classe Dragon au Portugal a été relancée, par sept ou huit marins, presque tous du CNC. Un peu plus âgés que moi, ils ont acheté quelques bateaux ensemble, puis trois autres sont venus… J’ai aussi acheté un Dragon. J’ai commencé à faire des courses juste pour participer, avec un équipage composé d’un de mes neveux et d’un ami, sans grande prétention… Etant complètement libéré de mes obligations professionnelles en 2007, j’ai recommencé à réfléchir à la classe Dragon. Elle s’était beaucoup développée, alors j’ai décidé d’acquérir un nouveau bateau et de faire des courses plus relevées. Et cela a dépassé toutes mes attentes. J’ai réussi à faire venir les dragonistes pour qu’ils fassent des courses ici, parce qu’il y avait une tradition de Dragon au Portugal. J’ai ensuite participé à la plupart des grands championnats internationaux, j’ai parcouru toute l’Europe de régates en régates. Je connaissais beaucoup de monde et on m’a demandé de devenir le président de la classe… j’ai refusé mais j’en ai été le vice-président pendant quatre ans. C’était beaucoup plus simple que de gérer le CNC, j’ai apporté quelques idées qui venaient du club, qui à l’époque avait déjà une grande expérience de l’organisation de trophées internationaux comme le RC44 ou le TP52. Je crois avoir une certaine responsabilité dans le fait que la classe Dragon a rendu leurs événements internationaux bien meilleurs. Après dix années très intenses, j’ai cessé de disputer les régates de Dragon en 2017, aujourd’hui, j’y participe de manière plus ludique.

Président inattendu…

Au Clube Naval de Cascais, nous étions à la fin du mandat de Miguel Magalhães, assez épuisé parce que ce mandat était plutôt ingrat : engager des travaux et essayer dans le même temps de faire fonctionner le club, cela était très stressant. Je me souviens du club à l’époque, il ressemblait à un camp de marines en Irak ! C’est à cette époque que Gonçalo Esteves m’a mis au défi de venir à la direction du CNC. J’avais de la disponibilité, je naviguais alors activement en Dragon, et j’ai assumé la tâche avec grand plaisir. J’ai été président du club pendant six ans, c’est-à-dire un mandat et demi, dans la seconde partie, j’ai dû être remplacé pour des raisons personnelles par Gonçalo, alors que j’étais encore vice-président pour un mandat, et depuis deux ans, je ne suis plus que membre du Conseil général. Ils ont eu la gentillesse de me garder, et j’y participe aussi avec plaisir. C’est alors que Gonçalo Esteves a eu cette idée de me remplacer par Miguel Horta e Costa comme Commodore ! Cette aventure à la direction générale du CNC s’est très bien déroulée. Le club a connu une énorme évolution, bien plus grande que nous ne l’imaginions. Notre Yacht Club a commencé à organiser beaucoup plus de régates, parvenant à éveiller l’attention de la municipalité de Cascais pour les grandes compétitions. Je dois également mentionner la création de la « voile adaptée » (Ndlr : pour les personnes à mobilité réduite) à l’initiative de Charles Lindley, un projet qui a été largement développé, ainsi que l’École de Voile qui continue d’être, et devrait rester, la partie la plus structurante du club. L’école est le moyen d’introduire et de présenter ce message, puis de passer à la compétition, en allant jusqu’aux Jeux olympiques. Cette période a coïncidé avec une époque dorée de la voile olympique portugaise. Nous avions onze marins aux jeux, une des plus grosses délégations du sport portugais. Tout cela a demandé beaucoup de travail. La voile adaptée a commencé au rythme d’une journée par semaine ; aujourd’hui ce sont presque tous les jours. Tout devenait de plus en plus complexe, plus professionnel. Beaucoup de choses ont été faites… Je ne sais pas s’il y a un moment singulier qui marque plus que d’autres, même si, comme Miguel Horta e Costa l’a déjà souligné, la remise du 75e anniversaire du CNC a donné lieu à une très belle cérémonie officielle au Palais de Belém. »

Le développement dans la continuité

Assurer la continuité… C’est précisément la raison pour laquelle j’ai accepté le défi de Gonçalo Esteves, en tant que Commodore. Le CNC étant membre du Conseil International des Yacht Clubs, la représentation internationale du club est de plus en plus importante. Nous avons eu la chance d’être invités, avec Gonçalo Esteves au meeting européen de Marseille, et ce qui s’y fait en termes d’organisation ne nous a pas beaucoup impressionné. Nous avons eu la chance d’être rapidement chargés d’organiser la prochaine rencontre européenne, et toute l’expérience que nous avions des organisations complexes, avec des sponsors exigeants, a conduit le président, lorsqu’il a terminé la réunion ici à Cascais, à dire que le prochain organisateur à suivre aurait une tâche difficile, car le CNC avait mis la barre pour ce type de réunion à un niveau beaucoup plus élevé… Je pense aussi qu’il est bien, pour la première fois, que nous ayons au Comité exécutif une femme, Ana Champalimaud, ainsi que Ricardo Schedel, à peine plus de trente ans, et représentant la jeunesse. Car nous devons nous battre pour cela, pour le rajeunissement de notre structure… Enfin, un mot sur les contrats signés entre le CNC et Rolex, et entre le CNC et la Fondation Mirpuri : c’est l’aboutissement de beaucoup de travail… »

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