Yacht Class n°13 (juin-juillet-août 2018)

YACHT CLUB DE MONACO

Du 26 au 31 mars, le Yacht Club de Monaco a accueilli la Monaco Swan One Design, organisée par le fameux chantier naval Nautor’s Swan. Cette régate, dédiée aux voiliers monotypes de la marque, inaugurait son tout premier circuit de compétitions, la Nations Trophy Mediterranean League.

Texte : Aurore Teodoro – Photos : Nautor’s Swan

Les compétitions se suivent mais ne se ressemblent pas au Yacht Club de Monaco (YCM). Fin mars, l’institution monégasque a accueilli une toute nouvelle manifestation, la Monaco Swan One Design, qui mettait aux prises les voiliers monotypes du célèbre chantier finlandais, Nautor’s Swan. Une grande satisfaction pour Leonardo Ferragamo, son président directeur général, qui est par ailleurs membre du club de la Principauté : « c’est proprement incroyable d’amener les Swan sur ce magnifique plan d’eau. Nous rêvions depuis longtemps de nous associer avec le Yacht Club de Monaco dont les infrastructures permettent d’organiser de tels événements ». Et pour son chantier, c’était aussi le début d’une nouvelle aventure, puisque cet évènement était en fait la première étape de sa toute nouvelle compétition : la Nations Trophy Mediterranean League. Un circuit de quatre courses qui emmènera les armateurs de Swan à travers la Méditerranée de Monaco à Palma de Majorque, en passant par Saint-Tropez. Leur saison se terminera ensuite en septembre par la Rolex Swan Cup, la régate historique du chantier qui se déroule tous les deux ans à Porto Cervo. Alors qu’il existe déjà de nombreux événements pour les Swan à travers le monde, le chantier s’est donc fixé un nouveau challenge il y a deux ans, à l’occasion de son 50e anniversaire. « Nous voulions mettre l’accent sur la famille des monotypes, qui prend toujours plus d’importance. Chaque classe monotype possède son propre championnat du monde ou d’Europe. La plupart d’entre eux sont des classes reconnues mondialement. Nous nous sommes dit, pourquoi ne pas les réunir tous lors d’une épreuve et faire revivre ce concept de nation, qui est à la base de tous les sports mais qui malheureusement s’est perdu pour beaucoup d’entre eux. Nous avons donc créé ce Trophée des Nations, l’année dernière à Palma de Majorque », explique Enrico Chieffi, le vice-président du chantier. C’est de cette nouvelle compétition biennale, qui a réuni pour sa première édition onze pays et près de trente bateaux, qu’est venue l’idée d’un circuit annuel : « Nous sommes demandés ce que nous pourrions faire entre-temps. C’est comme cela que sont nées les ligues, inaugurées en 2018 par celle de Méditerranée. Chaque année, il y aura un circuit pour les monotypes menant au trophée des nations l’année suivante ». La « Med Trophy » devrait ainsi être suivie dans les prochains mois par des courses dans le nord de l’Europe, avant de s’exporter aux Etats-Unis et en Asie.

Les armateurs à la barre

Sur le plan d’eau monégasque, huit nations avaient répondu à l’appel : l’Allemagne, l’Italie, Monaco, les Pays-Bas, l’Espagne, la Russie, la Suède et la Suisse. Au total, ils étaient douze voiliers : trois Club Swan 42, trois Swan 45 et six Club Swan 50. Plutôt pas mal pour une première ! « Ce premier événement représente pour beaucoup une sorte de test. Beaucoup vont suivre la compétition et attendre les retours des participants avant de décider de venir la prochaine fois », confirme Enrico Chieffi qui, au vu des commentaires positifs de des armateurs, attend déjà plus de monde lors des prochaines étapes. Mais comme le dit l’expression populaire, ce n’est pas tant la quantité que la qualité qui compte. Et dans les rangs des régatiers présents pour cette première Monaco Swan One Design, on retrouvait bon nombre d’équipages chevronnés. Tous étaient d’ailleurs présents à Palma de Majorque en octobre dernier pour le Nations Trophy, et y avaient généralement eu de bons résultats. Notons que pour cette compétition, le barreur est obligatoirement le propriétaire du bateau. « C’est une volonté assez forte. La plupart de ces bateaux comptent à leur bord tellement de navigateurs professionnels, que les armateurs deviennent des chefs de projet, mais ne profitent pas réellement. Toutes nos compétitions sont sur ce format, mettant les propriétaires sur un pied d’égalité, ce qu’ils apprécient », souligne le vice-président. Devant le Yacht Club de Monaco, trois catégories de Swan donc. Trois classes qui symbolisent différentes époques du constructeur, puisqu’un seul modèle de cette catégorie ne peut être produit à la fois par le chantier. Ainsi, cinq ans après le Swan 45 sorti en 2001 est né le Club Swan 42, un design original crée à l’origine pour le Yacht Club de New York. Arrivé en 2016, le Club Swan 50, lui, marque un tournant. Contrairement à ses deux aînés, il n’a pas été conçu par l’architecte historique du chantier, German Frers, mais par Juan Kouyoumdjian, alias Juan K. « Le 42 et le 50 appartiennent à une nouvelle ligne de produits (voir encadré). Ils sont plus spartiates et légers, avec moins d’aménagements intérieurs. Ils sont conçus pour être performants, pas pour être confortables. Avec ses intérieurs en bois, les différences du 45 sautent aux yeux, il s’inscrit dans la lignée des Swan classiques », souligne Enrico Chieffi. « Le Club 50 est plus ce que l’on pourrait appeler un bateau-concept. On remarque immédiatement qu’il est complètement différent de tout ce que l’on a pu construire jusqu’à présent. Nous voulions franchir une nouvelle étape à l’occasion du 50e anniversaire du chantier. C’était le bon moment pour enfreindre les règles et faire quelque chose de différent. Et le marché a vraiment salué le résultat. C’est un bateau très sophistiqué, rapide, moderne, équipé des technologies dernier cri. »

Triomphe italien

Et quoi de mieux qu’un plan d’eau très technique pour apprécier les qualités marines de ces unités, mais aussi celles de leurs équipages. Au total, neuf manches auront été disputées pour chacune des trois catégories sur des parcours « banane », deux allers-retours au vent et sous le vent plus une bouée intermédiaire, pouvant aller jusqu’à 6,8 milles nautiques. Un bon score quand on sait à quel point le plan d’eau de la Principauté peut subir les caprices du vent. D’autant que pendant toute la semaine, les régatiers ont pu s’en donner à cœur joie avec des conditions météorologiques diverses et variées. « Le premier jour, on a fait trois manches dans des conditions idéales, avec du Sud-Ouest et une mer plate », confirme Thierry Leret, directeur de course au Yacht Club de Monaco, « mercredi, on avait de la mer forte, du grand soleil, 20 nœuds de vent, une grosse mer croisée ». Le vendredi, un vent d’est avec une mer un peu plus plate que la veille, ont quand même permis de faire deux belles courses, tandis que la compétition se terminait en apothéose le samedi avec trois belles manches. Un panel parfait pour satisfaire et mettre en avant les qualités de chacun. Et les compétiteurs ont offert un beau spectacle. « C’est très impressionnant parce que le niveau est tel qu’en moins de deux minutes tous les bateaux ont franchi la ligne d’arrivée. Ils sont vraiment très proches et la moindre erreur, au départ, au passage de bouée, de tactique se paie cash », précise le directeur de course. Au terme des neuf courses, c’est le propriétaire du chantier Leonardo Ferragamo à bord de Cuordileone qui remporte l’étape chez les ClubSwan 50, après une domination sans faille puisqu’avec son équipage, composé de grands noms de la voile, dont le le tacticien Ken Read (America’s Cup, Volvo Ocean race…), il remporte quatre des neuf manches. Ils sont suivis de très près par l’équipage suisse de Mathilde qui termine à un point seulement. Vladimir Liubomirov (Bronenosec) du Y.C.M. se classe lui 4e. Dans la catégorie Swan 45, c’est le champion du monde 2017 Luis Senis Segarra (Porron IX) qui s’impose en remportant sept manches. Il est suivi de près par le sociétaire du club monégasque Ange Transparent 2 de Valter Pizzoli. Quant aux Club Swan 42, c’est un podium entièrement italien, composé de Far Star, barré par Lorenzo Mondo, qui faisait ses premiers bords sur le plan d’eau monégasque, Digital Bravo et Mela. Notons qu’avec deux vainqueurs italiens, c’est naturellement nos voisins transalpins qui prennent la tête du classement des Nations. Affaire à suivre lors des prochaines épreuves. Avant un retour en Principauté qui est déjà sur toutes les lèvres.


Une marque, trois familles

Sur le plan d’eau, les Swan et les Club Swan se retrouvaient réunis, symboles d’une deuxième jeunesse pour ce chantier qui a fêté ses 50 ans en 2016. « Tout ce que nous avons créé jusqu’à présent se dénommait Swan. Nous avons ressenti le besoin de différencier les produits des différentes lignes. Les Swan sont ce que nous avons toujours réalisé : de très bons yachts de croisière, très rapides. On attend d’eux qu’ils soient agréables et confortables, avec un intérieur complet, et que l’on puisse tout aussi bien naviguer que gagner des courses. Il y a 20-30 ans, ces bateaux faisaient partie des plus compétitifs sur le marché. Mais ce n’est plus le cas. La technologie a repoussé toutes les limites à un niveau tel qu’un bateau compétitif aujourd’hui ne peut pas être également confortable », explique Enrico Chieffi. « Nous avons donc lutté pour trouver l’équilibre entre haute performance et confort, tout en étant respectueux de notre ADN. Nous avons donc décidé de faire deux lignes différentes : le Swan qui reste ce qu’il a toujours été, avec notre designer historique German Frers. Et depuis le Club Swan 50, nous avons décidé de faire une ligne haute performance : le Club Swan. Un 125, un super maxi incroyablement rapide, est déjà en construction, et d’autres sont en développement. » Notons par ailleurs que pour répondre à un marché en plein expansion, le chantier a également créé une troisième famille, celle des Maxi Swan : des voiliers classiques, mais de plus 25 mètres. La saga du chantier finlandais n’est pas prête de s’arrêter.

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