Yacht Class n°32 (mars-avril-mai 2023)

La série de régates d’entraînements mensuelles d’hiver du Yacht Club de Monaco (YCM)
fête cette année son 10e anniversaire. L’occasion de revenir sur ce véritable championnat de Monaco qui a fait de la Principauté la base hivernale de la monotypie.

Texte : Aurore Teodoro – Photos : Carlo Borlenghi, Stefano Gattini et Francisco Ferri / Studio Borlenghi, Franck Terlin, Nathalie Couloud, Mesi / Yacht Club de Monaco et DR

Dix ans après leur création, les Monaco Sportsboat Winter Series (MSWS), ces régates d’entraînements hivernales mensuelles organisées entre novembre et mars, sont devenues un véritable championnat à portée internationale qui attire chaque année des dizaines d’équipages venus des quatre coins du monde. Retour en cinq points sur la compétition.

1) C’est un membre du club qui en a eu l’idée

Les MSWS sont nées sous l’impulsion de Valentin Zavadnikov. « Il cherchait une base d’entraînement hivernale pour lui, mais aussi pour faire venir ses amis qui naviguaient en Melges 20 », nous avait déjà confié Thierry Leret, directeur de course du YCM, responsable à l’époque de la section sportive. « A cette époque, nous organisions deux régates par mois en J/24 pour les membres du club. Valentin Zavadnikov a eu l’idée d’ouvrir des rendez-vous aux coureurs venus de l’extérieur. Les Monaco Winter Series, c’est un peu un mélange des deux. » Aussitôt, le succès est au rendez-vous puisque la première saison, lancée en octobre 2013, attire une trentaine de voiliers monotypes en Melges 20, SB20 ainsi que les J/24, rapidement remplacés par les J/70, devenus la série phare du club. Aujourd’hui, ce sont d’ailleurs ces derniers qui font les beaux jours de la compétition, même si les MSWS ont parfois invité, à titre exceptionnel, différentes classes comme les Smeralda 888, les M32 ou encore les GC32, venus sous l’impulsion de Pierre Casiraghi, dont l’aventure Malizia a commencé sur ce support. « Le J/70 correspondait vraiment aux attentes des propriétaires et des équipages. Il est relativement peu coûteux, demande peu d’équipiers. C’est un bateau facile à gérer qui permet de venir naviguer sans trop se compliquer la vie », rappelle Fanny Brouchoud, chef de projet de l’événement. « Beaucoup de marins sont partis vers cette série, qui a pris le dessus. La classe a toujours été présente à Monaco, dès sa création. Ce fut même l’une des toutes premières classes nationales à se développer. »

2) La Primo Cup – Trophée Crédit Suisse constitue l’un de ses actes

En jetant un œil au calendrier des Winter Series, une manche saute aux yeux : la Primo Cup. La grande fête hivernale de la monotypie, créée en 1985 sous l’impulsion du président du YCM, le Prince Albert II, a naturellement intégré les MSWS. « Lorsqu’on a créé ce championnat hivernal, la Primo Cup était déjà là. Cela aurait été un peu bizarre de ne pas l’intégrer, mais elle est toujours un peu à part », souligne Thierry Leret. Si elle compte comme un acte pour les séries engagées sur les MSWS, elle s’en distingue par la multitude de classes qu’elle accueille chaque année. « C’est vraiment un rassemblement des One Design, avec différents monotypes. On fait venir d’autres séries en fonction de nouveautés et des développements », rappelle Fanny Brouchoud. Au fil des ans, la compétition a notamment accueilli les Stars, Dragons ou encore les Longtze Premier ou les Smeralda 888. Initialement organisée en février, la Primo Cup est devenue, il y a quelques années, le grand final de ces régates hivernales. « On s’est aperçu qu’en l’organisant en mars, nous avions plus de séries et de monde. Il faut aussi savoir s’adapter », décrypte Thierry Leret. De quoi finir l’hiver et amorcer le printemps en beauté !

3) Un événement d’ampleur inégalée

La recette du succès ? Une formule clés en main qui permet de venir à l’automne pour le premier acte et de laisser son bateau en Principauté, où il sera gruté et stocké entre chaque événement. De quoi alléger la logistique et faciliter l’acheminement des équipages. A cela s’ajoutent aussi la douceur des hivers méditerranéens, l’attractivité de Monaco, sans oublier « le fait d’avoir été précurseur dans la classe, la proximité de l’aéroport et l’accueil du YCM », complète Fanny Brouchoud. La compétition a aussi profité du déménagement du club dans son nouveau bâtiment du Quai Louis-II, plus grand et plus moderne. « Maintenant, dans notre marina, on peut accueillir 40 à 50 bateaux d’un week-end à l’autre, tant sur l’eau qu’à terre. Cette force d’accueil contribue à la qualité du plateau », témoigne Thierry Leret. Avec des dizaines de bateaux engagés chaque année, la manifestation a trouvé son public. La saison dernière a même battu des records, bon nombre d’équipages étant venus découvrir le plan d’eau monégasque en amont du Championnat du monde qui s’y est déroulé en octobre 2022. Et si on s’attendait à un ralentissement en cette année post-Mondial, le club a quand même accueilli une quarantaine de J/70. « Nous sommes clairement mal habitués à Monaco, on est presque déçu… Mais c’est une belle participation. Il n’y a aucun autre club qui arrive à réunir 40 bateaux pour une régate d’hiver », souligne la chef de projet.

4) Une compétition prisée de l’élite de la voile

Comme dans tous les sports, l’intensité est la clé du succès. A raison d’un rendez-vous par mois entre novembre et mars, les MSWS offrent une opportunité unique de se préparer en conditions réelles aux échéances à venir. Mais au fil des années, ces régates hivernales sont devenues bien plus que de simples entraînements. « Pour nous, membres du club, les Winter Series sont très importantes. On peut dire que c’est un petit championnat d’Europe d’hiver parce que des équipages viennent de tout le continent, voire de plus loin », confirme Ludovico Fassitelli (Junda). Et parmi ces régatiers internationaux, on retrouve souvent l’élite de la discipline. Des athlètes de renom comme Paul Goodison, médaillé d’or en Laser aux JO de Pékin (2008), l’olympien Christian Nehammer, le champion du monde italien Roberto Benamati, Elliot Willis, membre de l’équipe de voile britannique de 470, ou encore le Brésilien Marcelo Ferreira, triple médaillé olympique en Star, ont ainsi navigué en Principauté. « Le niveau appelle le niveau. Les meilleurs qui viennent attirent les meilleurs », rappelle Thierry Leret.

5) Un esprit, une équipe, un club

Si la compétition est prisée par les marins des quatre coins du monde, elle offre aussi un terrain de jeu hors pair, à domicile, pour la flotte monégasque. Dans ses rangs, on retrouve également les jeunes régatiers de la section sportive. De quoi leur offrir une expérience précieuse, voire plus si affinités. « Les jeunes sont d’abord entre eux, à quatre ou cinq, et font leurs armes. Et il y en a toujours qui émergent et se font inviter par des équipages professionnels. On est très fier d’avoir Martin Lemarchand, vice-champion du monde 2022 (à bord du Leonteq de Pierrik Devic) ou encore Leonardo Bonelli qui a été champion d’Optimist et fait maintenant la tactique à bord du bateau de Ludovico Fassitelli. Pour nous, c’est une finalité et ces jeunes servent de locomotives pour les générations d’après », souligne Thierry Leret. Un esprit de transmission si cher au club, que l’on retrouve aussi chez ses membres. « Le YCM est une grande famille. Un club, un esprit », confirme Ludovico Fassitelli. « C’est facile d’avoir des pros, il suffit de les payer. Pour moi, c’est important d’avoir des jeunes. Le défi était d’être au niveau avec eux. Il y a trois ans, j’ai monté un équipage avec des jeunes du club, avec qui on a fait de très beaux résultats. Il reste encore Leonardo qui nous a rejoints à ses quinze ans. Maintenant, c’est un petit homme. C’est une grande satisfaction de pouvoir transmettre ».

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