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Yacht Class n°20 (mars-avril-mai 2020)
Yacht Club de Monaco
En février dernier, le Yacht Club de Monaco a accueilli près d’une centaine d’équipages répartis en six classes à l’occasion de la 36e Primo Cup – Trophée Crédit Suisse. A moins de deux ans du championnat du monde de J/70, qui se déroulera en Principauté en Octobre 2021, la série phare du club a enregistré un record de participation prometteur pour la suite.
Texte : Aurore Teodoro – Photos : Carlo Borlenghi et Stefano Gattini / Studio Borlenghi / Yacht Club de Monaco
Il y a des événements que l’on note chaque année, avec une grande impatience, sur le calendrier. Pour bon nombre de régatiers, la Primo Cup – Trophée Crédit Suisse est un de ces évènements. Cette grand-messe hivernale de la monotypie, qui compte par ailleurs comme le 4e acte des Monaco Sportsboat Winter Series (voir notre article p 194), marque pour beaucoup le début de la saison de compétition. Mais elle offre aussi la promesse de rencontres de haut vol et de nouveautés à découvrir. Cette 36e édition n’a pas manqué à ses habitudes puisqu’ils n’étaient pas moins de 450 marins d’une vingtaine de nationalités à avoir, cette année encore, répondu à l’appel du club de la Principauté. Soit « un total de 97 bateaux au départ, avec une participation record pour les J70 – dont le championnat mondial se déroulera du 18 au 23 octobre 2021 à Monaco – qui compte 61 unités. On a vraiment un plateau très intéressant avec notamment la présence de deux bateaux américains, mais aussi d’un Espagnol, ce qui n’est pas fréquent. Il y a toujours beaucoup de gens du Nord : Suisse, Allemand, Suédois, Danois, Anglais…C’est vraiment une jolie édition, on est plutôt contents », explique Fanny Brouchoud, chef de projet de l’événement au Yacht Club de Monaco. Aux côtés des J/70, on retrouvait également deux autres classes majeures du club : les Smeralda 888, avec une flotte 100 % monégasque, ainsi que les Melges 20, composée principalement d’équipages russes et monégasques. Les Longtze Premier, des fidèles de l’événement, étaient eux aussi de retour.
Deux nouvelles classes
Et comme chaque année, le YCM s’est voulu à la pointe des nouvelles séries, en s’ouvrant à des nouveaux bateaux en plein développement: les L30 et les Onefly. « Le L30 est un support intéressant. C’est un nouveau format de 30 pieds avec deux barres à roue. Il est conçu comme un gros bateau mais facile à déplacer, puisqu’il est transportable sur route, mais aussi facile à mâter, à mettre et à sortir de l’eau. Il est prévu pour deux formats, soit en équipage de 5/6 comme pour la Primo Cup ou en double pour les courses offshore, puisqu’il est en lice pour être le support des Jeux Olympiques de Paris 2024 en offshore double mixte », souligne Fanny Brouchoud. Avec ses aménagements conçus pour la course, mais aussi pour « la navigation à la journée, en famille et au large », comme l’explique son architecte, le médaillé olympique ukrainien Rodion Luka, cette série connaît une fulgurante ascension depuis sa création l’an dernier. Sur les quais monégasques, ils étaient huit cette année. Des Coréens, des Japonais, des Ukrainiens, des Espagnols… « Les gens commencent à s’entraîner pour les Jeux olympiques dès maintenant. L’équipe de France a acheté deux bateaux, les Coréens aussi. C’est devenu très professionnel », précise Rasmus Topsch, le président de la classe.Autre nouveauté, les Onefly, une nouvelle petite série en développement. « C’est un dériveur à foil qui, à près 8 nœuds de vitesse, commence à décoller de l’eau et à accélérer. Son record de vitesse est de 28 nœuds », explique le coach du YCM Thomas Champion, en charge des Onefly sur l’événement. Au total, ce week-end-là, ils étaient dix, venus pour des démonstrations, runs de vitesse et régates au large de la digue du Port Hercule. Et le format a séduit les régatiers présents, comme le staff. « C’est un bateau léger comme une libellule. Cela réunit un peu toutes les générations, puisque cela plait beaucoup aux jeunes comme aux moins jeunes qui sont expérimentés », confirme Thierry Leret, le directeur de course du YCM et principal race officer de la compétition. A l’instar de Christopher Pratt, qui compte plusieurs participations à la Transat Jacques-Vabre et à la Solitaire du Figaro, présent ce week-end là ou encore Nicolas Berenger « qui a fini 2e après huit manches. C’est un coureur professionnel qui a gagné la Primo Cup à plusieurs reprises sur différents bateaux, notamment sur des Longtze et qui s’est mis au Onefly ».
Le phénomène « mondial »
Et côté compétition aussi, cette édition 2020 aura une fois encore tenu toutes ses promesses, avec en bonus un soleil éclatant et des températures anormalement douces. « On a eu des conditions très sympathiques, surtout le premier jour. On a navigué avec un vent établi de force 3-4, soit 15 nœuds de vent », relate Thierry Leret. « Le lendemain on a eu du vent d’Est un peu plus faible de 5/8 nœuds ». Et malgré l’absence de vent le dimanche, les régatiers auront au total pu effectuer quatre belles manches sur ce plan d’eau réputé difficile. « C’est la première fois que je naviguais ici, j’ai pu m’en rendre compte. C’est un endroit très technique, très exigeant, avec beaucoup de changements de vent. À cause de la baie, il y a toutes sortes de perturbations venues des côtes. Il faut vraiment bien connaître l’endroit », souligne Rasmus Topsch. Se familiariser avec les spécificités du plan d’eau monégasque. C’est ce qui attire depuis quelques temps déjà bon nombre d’équipages en J/70. Effet mondial oblige. De bon augure pour l’avenir de la classe. « On sent que dans cette catégorie, ça monte en quantité mais en niveau aussi. Les vainqueurs de l’année dernière ne sont pas ceux de cette année. Le Russe Elf de Mikhail Sheremetev a dominé les débats. Ils étaient toujours bien classés (2e, 2e, 2e et 6e) », confirme Thierry Leret, avant d’ajouter : « Les conditions n’étaient pas faciles, ce n’était pas forcément évident de se positionner devant 65 bateaux de façon régulière. Certains équipages, dont notamment des membres du club ont gagné des manches, mais n’ont pas réussi à rester toujours au contact. Le niveau étant très élevé, ce n’est jamais le même qui gagne. Même l’équipe russe n’a pas gagné une seule manche, cela montre que le combat est difficile ». Pour le directeur de course, la belle satisfaction vient aussi du Monégasque Giangiacomo Serena di Lapigio (G-Spottino) qui finit 3e sur le podium. « Il a l’habitude de courir sur d’autres supports, et qui se met aux J70, certainement pour le mondial et qui ne cesse de progresser d’actes en actes. C’est prometteur », avance Thierry Leret. Car à moins de deux ans de cette grande échéance, tous sont déjà aux avant-postes. Avec au premier rang les membres du club monégasque, comme par exemple Ludovico Fassitelli, Tristan Le Brun ou encore Loïc Pompée qui auront à cœur de briller à domicile. « L’objectif aujourd’hui est le Mondial de Monaco, ainsi que les championnats d’Europe qui auront lieu à Hyères quelques mois avant. On essaie de progresser au fur à mesure des mois et des années. Le niveau est très bon en J70, c’est un affrontement qui est très sportif. Et justement c’est toujours le meilleur qui gagne », confirme Loïc Pompée (Allo III).
Rendez-vous en mars
Et l’adage vaut aussi pour les autres supports, où la bataille a été ardue. Notamment en Melges 20, où Valentin Zavadnikov (Oleg Reps) s’impose lors de la deuxième journée de régates après une belle remontée sur ses concurrents russes qui avaient dominé les deux premières manches. Il est rejoint sur le podium par un autre sociétaire du club, Path barré par Anatoly Karachinsky (3e). Du côté des Smeralda 888, une série entièrement monégasque, cette Primo 2020 avait des airs de revanche. Vainqueur en 2018, troisième l’an dernier, Timofey Sukhotin s’impose lors de ce premier grand rendez-vous annuel de ce support et prend la tête provisoire du championnat, devant Botta Dritta de Francesco Vauban et Black Star de Paolo Rotelli. Charles de Bourbon des Deux Siciles, le tenant du titre 2019 et président de la classe, prend la 4e place. Autre catégorie, autre habitué des podiums, l’équipage suisse de Shensu, qui partait favori, n’a pas manqué à sa réputation et l’emporte chez les Longtze Premier, après avoir fait cavalier seul et remporté trois manches. A noter aussi la belle troisième place du sociétaire monégasque Denis Lankin sur un L30. Celui-ci aura l’occasion de continuer à apprivoiser son support puisque la classe a décidé de prolonger son séjour en Principauté pour assister au dernier acte des Sportsboat Winter Series (5-8 mars 2020) aux côtés des J/70 et de Melges 20, mais aussi des Dragon. Notons d’ailleurs que c’est en mars que tous se donneront désormais rendez-vous, puisque l’an prochain, la Primo Cup sera décalée d’un mois. Et comptera comme le 5e et dernier acte des Monaco Winter Series. « Février, c’est très tôt pour certains pays nordiques, notamment les Suisses. Cette année, on a des conditions « champagne ». Il fait beau et il ne fait pas trop froid, mais on a aussi eu des éditions avec de la neige, ou les concurrents étaient agglutinés sous le chauffage. L’idée de la déplacer, c’est d’attirer plus de monde, dans des conditions un peu plus clémentes, avec aussi des journées plus longues nous laissant plus de latitudes pour pouvoir naviguer. » De quoi aussi finir en apothéose la saison des régates hivernales et en commencer une nouvelle de la même manière.