YACHT CLASS n°38 (sept-oct- nov 2024)

Yacht Club de Monaco

Créé il y a dix ans, le Monaco Energy Boat Challenge, qui met aux prises des bateaux de course révolutionnaires et respectueux de l’environnement, est devenu un véritable écosystème mêlant professionnels de l’industrie et jeunes étudiants, avec pour toile de fond un yachting plus durable. 

Texte : Aurore Teodoro – Photos :  Francesco Ferri, Stefano Gattini, Team Borlenghi et Mesi / YCM.

n nous avait promis de l’ambiance. Et il y en avait, en ce premier samedi de juillet, devant le Yacht Club de Monaco (YCM), à l’occasion de la Championship Race. Sous un soleil de plomb, le Prince Albert II, président du club, donnait le coup d’envoi de cette épreuve de vitesse sous forme de duels éliminatoires sur un parcours à l’intérieur de la marina, encouragés par le speaker et les collègues des pilotes. Le point d’orgue d’une semaine marquée par la franche camaraderie, mais surtout par l’esprit de compétition et le dépassement de soi, sous l’égide de la protection de l’environnement et du progrès technique. Course initialement réservée aux bateaux solaires, le Monaco Energy Boat Challenge (MEBC) a pris du galon en dix ans pour devenir un rendez-vous incontournable pour les jeunes ingénieurs, mais aussi pour l’industrie du yachting. Preuve en est, la présence notamment des chantiers Lürssen, Ferretti Group, Oceanco ou encore Monaco Marine en tant que partenaires de ce rendez-vous. « L’un des aspects uniques de cet évènement est l’interaction entre les étudiants et les professionnels du yachting », confirme Bernard d’Alessandri, secrétaire général du YCM. « L’évènement offre des opportunités uniques de mentorat, de partage de connaissances et de réseautage, ce qui est crucial pour stimuler l’innovation et la recherche. »

Une synergie de tous les acteurs

Au-delà de l’aspect sportif et technologique, le MEBC est donc devenu aujourd’hui une véritable plateforme d’échange entre les jeunes ingénieurs, venus présenter leurs dernières innovations, et les industriels du yachting. « On a essayé de créer beaucoup de synergies », confirme Charlotte Mille, directrice du développement durable au YCM et cheffe de projet de l’évènement. La 11e édition a ainsi battu tous les records avec 40 universités en lice, venues de 25 pays. Parmi les 700 étudiants mobilisés tout au long de l’année, 450 avaient fait le déplacement jusqu’en Principauté pour ces six jours au programme complet alliant compétition sportive (course de vitesse, d’endurance, slaloms, championnat de e-sport…) mais aussi tech talks, forum de l’emploi, conférences sur l’hydrogène ou, cette année, sur les carburants alternatifs. Le programme de mentorat, lancé en 2023, a lui aussi pris de l’ampleur. « L’année dernière, nous avions cinq ou sept mentors, cette année, ils sont onze et, par le biais des conférences, je sais qu’on en aura trois ou quatre de plus l’an prochain », confirme Charlotte Mille, ravie du succès de ce programme qui vise à accompagner les jeunes ingénieurs dans leur gestion du projet. Parmi les mentors, on retrouvait notamment Sanlorenzo qui accompagnait les équipes italiennes de Uniboat, grande gagnante des trois dernières années, et de Elettra UniGe. « Nous sommes convaincus qu’en soutenant les jeunes générations, nous serons en mesure de relever les défis de la durabilité », explique Massimo Perotti, président exécutif de Sanlorenzo. Quelques mètres plus loin sur le quai, l’équipe Tameo ENSTA s’avoue ravie aussi de son mentor et sponsor principal, Monaco Marine. « Nous avons candidaté pour ce programme. On a réussi à montrer qu’on avait les capacités de faire un bon bateau et ils nous ont choisis avec l’équipe des Arts et Métiers. Outre l’aspect financier, cela nous a énormément aidés au niveau technique, pour la conception et la réalisation, et pour les contacts, si l’on manquait d’une pièce ou si nous avions besoin de conseils. Des personnes étaient dédiées à nous aider, notamment Angèle Navarro, notre marraine de projet, que l’on appelait régulièrement pour montrer l’avancée du bateau. Toute l’équipe de Monaco Marine nous soutenait. Enfin, et surtout, on a pu tester le bateau au chantier, à Toulon, en amont, pendant trois jours », développent Thomas Wawrzyniak et Enzo Sawaya, deux membres du Team Tameo ENSTA / Monaco Marine. 

La compétition franchit aussi un cap

Comme chaque année, cette 11e édition a réservé des nouveautés, avec notamment un nouveau prix sportif. « Jusqu’à présent, on avait les classes Energie et Solaire, mais on ne savait pas qui était le grand gagnant parce qu’elles étaient séparées. On s’est dit pourquoi pas ne pas créer un titre de champion du MEBC, désignant l’équipe qui aura été aussi bonne à terre, lors des Tech Talks, qu’en mer », souligne Charlotte Mille, avant de préciser : « Au lieu de ne se réunir que pendant le MEBC, le jury a organisé une consultation préalable, qui a permis une première notation. De là sont sortis les six meilleurs dossiers qui sont présentés en tech talks, sur les trois soirées ». Cette année, c’est le vainqueur de l’Energy Class, l’équipe grecque d’Oceanos NTUA qui remporte ce premier titre de MEBC Champion. Autre nouveauté de taille, la création du Prix de la Fondation Prince Albert II qui vient récompenser la meilleure solution technologique en termes d’efficience énergétique et de réduction des émissions de carbone. « La Fondation, déjà partenaire de l’évènement et membre du jury, a souhaité renforcer sa présence en poussant le yachting vers une réflexion encore plus durable en proposant un prix de 25 000 euros. C’est une belle opportunité pour l’université qui développe ce projet. L’équipe vainqueur devra ensuite revenir vers nous pendant les trois prochaines années, pour qu’on puisse suivre l’évolution du projet », explique Charlotte Mille, qui promet déjà quelques nouveautés pour l’édition 2025, dont notamment une nouvelle classe dédiée à l’intelligence artificielle. De quoi continuer à motiver les équipes dans leur quête de la propulsion du futur, toujours plus efficace et moins polluante. A noter que cette dernière décennie a été témoin d’un bond technologique considérable. Cette année, un nouveau record a été établi dans la classe Open Sea. Le Goldfish X9 d’Evoy a ainsi réalisé des pointes à 56 nœuds, et surtout une vitesse moyenne 48,60 nœuds, bien au-delà du record de 34,71 nœuds enregistré l’an dernier. Et bien loin aussi du tout premier record de 23,996 nœuds établi en 2015. Le futur reste à portée de main. 

Le magazine actuel